« Les aubes écarlates », par Léonora Miano
Editions Pocket, 01/09/2011, 264 pages
Au Mboasu, petit État d’Afrique équatoriale, vieux dictateur et enfants soldats se disputent le pouvoir en déchirant le pays. Pendant ce temps, comme le fait Ayané dans un orphelinat de guerre, les femmes s’échinent à recoller les morceaux. Portées par le verbe des morts et des disparus, elles renforcent le lien entre l’Afrique d’hier et celle d’aujourd’hui. C’est par elles que ce continent construira son avenir.
Pierre angulaire de sa trilogie africaine (publiée entre L’intérieur de la nuit et Contours du jour qui vient), Les aubes écarlates est aussi le plus abouti de l’auteur camerounais sur la mémoire et l’esclavage, des thèmes souvent abordés, mais jamais aussi bruyamment. Dans un petit pays imaginaire d’Afrique équatoriale, le Mboasu, ravagé par la dictature, Epa est recueilli par Ayané (la même, bien sûr, que dans L’intérieur de la nuit), dans un orphelinat de guerre. Du fond de sa paillasse sommaire, « le fugueur » revient sur ce qui l’a amené à devenir un enfant-soldat, enrôlé tout petit par les rebelles. Il raconte leurs délires révolutionnaires, la violence, les exactions, les humiliations, la haine interethnique. Comme un écho tragique à ce destin trop banal, il y a aussi, et surtout, la rencontre d’Epa avec des fantômes d’esclaves, l’occasion pour Léonora Miano de revenir sur la traite négrière, qui a, pour elle, tout à voir avec ces guerres fratricides. Saturé d’exotisme, d’exorcismes et d’une poésie à couper le souffle, ce roman est un triste et magnifique chant d’amour à l’Afrique. (Le Point)